Blackmail + Bajram Bili + Tresors
- Kraut / Electro / Dark / Garage / Psyche
- Le Club
- Production : TP
BAJRAM BILI (Tours, FR.)
Une soirée qui affiche trois groupes qui revendiquent appartenir à la grande famille electro-psyché du vintage krautrock et du garage moderne, qui s'apprécient mutuellement et qui utilisent tous des synthés, des boîtes à rythmes et des batteries est, sur le papier, ce qu'on pourrait appeler une soirée cohérente. Et pourtant, chacun y va de sa vision des choses. Le tourangeau Bajram Bili par exemple, lorgne du côté spatial et nébuleux du psychédélisme moderne, citant à la fois Zombie Zombie, Spectrum et Beak> dans ses longs titres enfumés qui finissent toujours par nous prendre au corps. Pour lui en effet, transe rime avec danse, et ses amours affichées de James Holden, Boards Of Canada ou Lcd Soundsystem ne laissent planer aucun doute quand à sa maniaquerie : on sent qu'Adrien a bien analysé les techniques de ses idoles avant de se lancer dans l'écriture de son deuxième disque, et s'il a chipé les meilleurs tricks de ses maîtres, il a surtout réussi à fabriquer des ambiances si personnelles qu'on lui pardonne. Son disque, qu'on écoute souvent, fini par prendre le dessus et on s'incline, tellement c'est fait intelligemment. On ne vous cache pas qu'on a très envie de voir la nouvelle formule live, en duo synthés batterie (pour danser il parait).
Pour les fans de Beak>, Zombie Zombie, LCD Soundsystem, Boards Of Canada, James Holden... (FL)
BLACKMAIL (Paris, FR.)
Dans le registre psyché-kraut-garage-electro qui est donc le thème de cette soirée, le trio Blackmail sera la réincarnation moderne de Suicide. Evidement, vous avez le droit de sourire car c'est vrai que cette comparaison à Suicide revient très souvent dans les pages de ce fascicule. Mais bon, c'est comme ça, et pis c'est tout. Blackmail donc (les deux Bosco + un This Is Pop et Beat Mark – mais ne le dites à personne surtout) se sont d'abord mis d'accord sur la base du projet : faire de la musique de défoncés (connaissant les loustics, ça a dû surtout carburer au Pineau des Charentes) en rêvant à la Factory de Warhol. Résultat, un album de « kraut-blues electronique » enregistré dans une chambre d'hôtel de luxe place de l'Opéra à Paris, et une plongée dans les eaux troubles de la décadence en cinémascope noir et blanc. De la boîte à rythmes plongée dans une reverbe glaciale, des synthés tordus, une production massive et pourtant bricolée, un chant habité et des images qui sortent des caves new-yorkaises de la fin des années 70 : il ne nous en fallait pas plus pour tendre l'oreille et finir par se faire attraper par cette enfilade de tubes qu'on aurait aimé entendre au CBGB à l'époque, et dont certains déjà remixés par Cosmo Vitelli ou Crackboy font danser les zombies dans les clubs interlopes de Paris ou Berlin – et au Temps Machine aussi, si si.
Pour les fans de Suicide, de Kill For Total Peace, de Wooden Shjips, de Spacemen 3. (FL)
TRESORS (Paris, FR.)
Avec Adrien Bajram Bili, cela fera donc trois Adrien en tout dans cette soirée (les deux Trésors s'appellent Adrien). Nous voilà bien avancés – quoique, au fond, la musique de Trésors se rapproche plus de celle de Bajram Bili que de celle de Blackmail, même si ces derniers ont remixé ces premiers, vous suivez ? Enfants de la noise et du post-punk, les deux Adriens sont des jeunes gens de leur temps, fricotant en souterrain dans la mafia des musiques étranges et assumant leurs amours mutantes, de Neil Young à Hot Chip, de Liars à Joy Division, de Robert Wyatt à Brian Eno en passant bien évidement par la techno qui, mine de rien, est la base de leur musique, ne leur en déplaise. Même si la batterie semble avoir récemment remplacé les rythmes du laptop, Trésors reste un groupe résolument electro-pop, mais quand même moins Depeche Mode que Yan Wagner ou David Shaw, moins space-kraut que Zombie Zombie et moins club-martial que Rebotini. Vous suivez toujours ? Il faut dire que les deux beaux jeunes hommes se méfient des codes, en général, et vont là où les autres ne vont pas, tout à leur honneur. Leur album « Missionnaires » (en attendant le nouveau) ne ressemble à rien de connu directement, même si on se sent à l'aise dès la première écoute : des synthés en arpèges délicats, des basses et boîtes à rythmes synthétiques et un chant sensible qui rappelle leur passé de fans d'indie-rock lo-fi (rare dans ce style). Le genre de disque qui enlace et qu'on écoute de bout en bout en se sentant bien. Cette soirée « découvertes » va jouer avec nos petits corps. Même pas besoin de drogue.
Pour les fans de Liars, de Joy Division, de Brian Eno, de Hot Chip. (FL)